Data

Date:
29-03-1995
Country:
France
Number:
156
Court:
Cour d'Appel de Grenoble, Chambre Commerciale
Parties:
Société Camara Agraria Provincial de Guipuzcoa v. André Margaron

Keywords

JURISDICTION - 1968 BRUSSELS CONVENTION - JURISDICTION OF COURT FOR PLACE OF PAYMENT OF PRICE

PRICE - PLACE OF PAYMENT OF PRICE (ART. 57(1)(A) AND (B) CISG)

DELIVERY OF THE GOODS - PLACE OF DELIVERY (ART. 31(A) AND (C) CISG)

INTEREST (ART. 78 CISG) - RIGHT TO INTEREST IN CASE OF LATE PAYMENT OF PRICE - NO FORMAL REQUEST NECESSARY - ACCRUAL OF INTEREST

Abstract

A French seller and a Spanish buyer concluded several contracts for the sale of maize. All the goods were delivered, but the buyer did not pay the whole price. The seller commenced an action against the buyer before a French Court, claiming payment of price as well as interest. At first instance the Court, without applying CISG, ordered the buyer to pay the full price but held that the seller was not entitled to interest.

The buyer appealed, arguing that the French Court did not have jurisdiction.

The appellate Court applied Art. 5(1) of the EC Convention on Jurisdiction and the Enforcement of Judgments in Civil and Commercial Matters (Brussels 1968), under which a person domiciled in a Contracting State [i.e. the buyer] may be sued in the Court for the place of performance of the obligation in question (payment of price). The Court applied CISG to determine the place of payment of the price as at the time of the conclusion of the contract the parties had their places of business in contracting States (Spain and France) (Art. 1(1)(a) CISG).

The Court left open the question whether Art. 57(1)(a) or (b) CISG applied, as in both cases it would have jurisdiction. According to Art. 57(1)(a) CISG, in absence of an agreement to the contrary, the price has to be paid at the seller's place of business. If the parties had agreed instead that payment should be made against the handing over of the goods (Art. 57(1)(b) CISG), the obligation to deliver the goods was to be executed at the place of business of the seller or by handing the goods over to the first carrier for transmission to the buyer (Art. 31(a) and (c) CISG). So, in both cases, the price had to be paid within the sphere of jurisdiction of the Court.

The seller was awarded the purchase price plus interest, accruing from the date when payment was due. The Court observed that the duty to pay interest for the delay in payment is not conditional on a formal request by the seller.

Fulltext

[...]

COMPOSITION DE LA COUR:
Lors des débats et du délibéré:
Monsieur BERAUDO, Président
Monsieur BAUMET, Conseiller
Monsieur FALLET, Conseiller

[...]

Attendu que la CAMARA AGRARIA PROVINCIAL DE GUIPUZCOA (la CAMARA) a conclu en août, septembre et octobre 1991 avec Monsieur André MARGARON, Agriculteur à Roybon (38940), des contrats de vente portant sur 10.000 tonnes de maïs destiné à l'alimentation du bétail;

Qu'il est constant que les marchandises commandées ont été livrées à la CAMARA;

Que Monsieur MARGARON a fait assigner la CAMARA en paiement de la somme de 111.094,29 F, correspondant au montant de quatre factures, majore de 9.268,79 F, à titre d'intérêts de retard;

Attendu que le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE s'est déclaré compétent pour connaître du litige au motif qu'en application de l'article 5,1 de la convention de Bruxelles, l'obligation de payer s'exécutait à GRENOBLE, sur un compte ouvert à la S.A. LYONNAISE de Banque;

Que la CAMARA a été condamnée à payer 101.825,50 F, montant en principal de la facture de Monsieur MARGARON; Que le Tribunal a rejeté la demande en paiement des intérêts et a alloué 10.000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

Attendu que, devant la Cour, la CAMARA conclut ainsi qu'il suit:

'Recevoir la CAMARA AGRARIA en son appel;

La déclarer bien fondée;

Dire que le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE aurait dû se déclarer incompétent au profit du Tribunal de GUIPUZCOA;

A titre subsidiaire, infirmer le jugement entrepris;

Condamner Monsieur MARGARON au paiement de la somme de 10.000 F H.T, en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

Le condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP CALAS et BALAYN, Avoués, pour ceux le concernant.'

Qu'elle fait valoir sur la compétence du Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE que 'même si les règlements ont été faits auprès de la S.A. LYONNAISE de Ranque à GRENOBLE, l'obligation qui sert de base au paiement est le contrat de livraison qui a été exécuté en Espagne'; Que le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE aurait dû se déclarer incompétent au profit du Tribunal du GUIPUZCOA, en application de l'article 10,5Ý du Code Civil espagnol;

Que, sur le bien fondé de la demande, elle fait valoir, en substance, que Monsieur MARGARON commercialisait directement en Navarre, le même maïs, au prix de 0,14 F le Kg, au lieu de 0,16 F et que, à la suite d'une réunion tenue le 26 septembre 1991, avec Monsieur MARGARON, il avait été décidé que la CAMARA bénéficierait du prix inférieur;

Attendu que Monsieur MARGARON conclut ainsi qu'il suit:

'Rejeter l'appel; Confirmer le jugement; Y ajoutant, Dire que les intérêts seront capitalisés par application de l'article 1154 du Code Civil; Condamner ]'appelante à l0.000 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, pour l'instance d'appel; La condamner aux dépens d'appel.'

Qu'il fait valoir, sur la compétence, que le prix était payable à GRENOBLE et que le vendeur s'acquittait de son obligation de livraison en France;

Que, sur le fond, il conteste l'accord allégué par la CAMARA et indique que 'l'appelante n'a ni retourné les dernières factures ni expliqué ses règlements, ni donné signe de vie pendant deux ans (conclusions d'octobre 1993)';

SUR CE, LA COUR,

Attendu qu'il est constant, entre les parties, que la convention de Bruxelles du 27 septembre l968, telle que modifiée le 26 mai l989 à SAINT-SEBASTIEN, entrée en Vigueur le 1er février 1991, pour l'Espagne et la France, est applicable à la détermination de la juridiction compétente;

Attendu que, lors de l'audience, la Cour a indiqué aux parties que la convention de VIENNE du 11 avril 1980, sur la vente internationale de marchandises, entrée en vigueur pour l'Espagne le 1er août 1991, était applicable au fond du litige et que ses dispositions relatives au lieu de paiement avaient une incidence sur la compétence juridictionnelle;

Que les parties ont été invitées à faire connaître par note en délibéré, leurs observations sur l'application des dispositions de la convention de VIENNE, avant le 15 mars 1995; Qu'il leur a été précisé que leur silence serait interprété comme une renonciation à faire valoir tout moyen fondé sur cette convention;

Attendu que la CAMARA, par note du 14 mars, a fait valoir que les dispositions de l'article 57 de la convention de Vienne relatives au paiement à l'établissement du vendeur ou au lieu de remise des marchandises, conduisaient à la compétence du Tribunal de GUIPUZCOA;

Attendu, sur la compétence juridictionnelle, que la détermination du lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande, prévu par l'article 5,1 de la convention de BRUXELLES, pour désigner le Tribunal devant lequel une partie domiciliée dans un autre Etat contractant peut être attraite, doit être faite selon les règles de droit international privé du for;

Attendu que, s'agissant d'un contrat de vente internationale de marchandises, conclu entre deux contractants établis dans deux Etats différents, parties à la convention de VIENNE, il y convient de rechercher dans cet instrument où se réalise l'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande;

Attendu que la demande introduite par Monsieur MARGARON est une demande en paiement; Que l'article 57,1 de la convention de VIENNE stipule ceci:

'Si l'acheteur n'est pas tenu de payer le prix en un autre lieu particulier, il doit payer le vendeur,
a) a l'établissement de celui-ci, ou,
b) si le paiement doit être fait contre la remise des marchandises ou des documents, au lieu de cette remise'.

Que l'article 31 alinéas a et c, applicables aux faits de l'espace, prévoit que l'obligation de livraison du vendeur s'exécute dans son propre établissement au moment de la conclusion du contrat ou par la remise au premier transporteur, pour transmission à l'acheteur;

Attendu, en conséquence, que l'obligation de payer de la CAMARA s'exécute dans le ressort du Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE, que le paiement ait été ou non subordonné à la livraison des marchandises;

Qu'en tout cas, en l'absence de convention entre les parties que le paiement ou la livraison devait avoir lieu à GUIPUZCOA, le Tribunal de cette ville n'est pas compétent;

Attendu, au surplus, que les dispositions de l'article 10.5 du Code Civil espagnol, auxquels la CAMARA se réfère, sont relatives à la compétence législative et non pas à la compétence juridictionnelle; Que s'il existait en droit espagnol une règle de compétence interne ou internationale contraire aux dispositions de la convention de BRUXELLES, ces dernières devraient prévaloir;

Attendu, en conséquence, que le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE, et par suite, la Cour d'Appel de GRENOBLE, sont compétents pour statuer sur le fond du litige;

Attendu, sur le bien fondé de la créance de Monsieur MARGARON, vendeur, qu'il est constant entre les parties que le contrat de vente a été conclu initialement pour un prix de 0,16 F par kg de marchandises livrées;

Que la CAMARA fait valoir une réduction du prix a 0,14 F;

Que l'article 29 de la convention de VIENNE stipule qu' 'un contrat peut être modifié ou résilié par accord amiable entre les parties';

Qu'il y a lieu pour la Cour de rechercher s'il y a eu un accord entre les parties sur une modification d'un élément constitutif du contrat, tel que le prix;

Que la CAMARA produit des attestations d'un agriculteur et d'un vétérinaire qui disent avoir assisté à une réunion tenue le 25 septembre 1991, dans les locaux de la CAMARA, avec Monsieur MARGARON;

Que ces témoignages indiquent qu'il a été décidé (se acordó) que le prix à payer pour la totalité de la marchandise serait de 0,14 F le Kg; Mais qu'aucune attestation ne mentionne de façon précise un accord de Monsieur MARGARON; Que la modification d'un prix de vente ne peut pas résulter d'une ambiance générale d'une réunion;

Que la CAMARA n'a pas adressé de lettre de confirmation d'une éventuelle décision qui aurait été prise quant à la modification du prix;

Qu'elle ne produit pas plus d'éléments quant aux prix pratiqué en Navarre qui aurait été la cause de la modification;

Qu'en sens inverse, Monsieur MARGARON produit des factures faisant état d'un prix de 16O F la tonne des 30 septembre, 1er octobre, 2 octobre 1991, donc postérieures à la réunion alléguée par la CAMARA, qui n'ont été l'objet d'aucune critique quant au mode de calcul de leur montant;

Qu'en outre, un règlement de 177.439,72 F a été effectué le 21 janvier 1992, par la CAMARA, sans qu'elle fasse, non plus, d'objection sur le mode de calcul du montant;

Qu'enfin une lettre de Monsieur MARGARON réclamant le paiement des sommes en retard, datée du 10 juillet 1992, est restée sans réponse;

Attendu, en conséquence, que les pièces du dossier ne permettent pas à la Cour de constater un accord des parties sur la modification du prix initialement fixé et acquitté par la CAMARA jusqu'au 21 janvier 1992;

Attendu, sur la créance de Monsieur MARGARON, que la somme de 101.825,50 F réclamée en principal par Monsieur MARGARON n'est pas critiquée dans son montant pour la CAMARA, si le prix de 0,16 F le Kg est retenu; Qu'il y a donc lieu de faire droit à la demande;

Attendu, sur les intérêts, que l'article 78 de la convention de VIENNE prévoit que les intérêts moratoires sont dus, quand le débiteur est en retard; Qu'à la différence du droit français, une mise en demeure n'est pas nécessaire;

Qu'il y a donc lieu de juger que les intérêts courront du lendemain du jour où la CAMARA aurait dû payer la facture correspondante;

Attendu, sur la capitalisation des intérêts, qu'il y a lieu de faire droit à la demande, à compter de la date des conclusions qui la formulent (2 mai l994), lorsqu'une année entière aura couru;

Attendu, sur la demande de 10.000 F, au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, qu'il y a lieu d'y faire droit;

PAR CES MOTIFS

LA COUR:

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

JUGE que le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE est compétent pour connaître de la demande en paiement de Monsieur MARGARON, en application de l'article 5,1 de la convention de BRUXELLES;

CONFIRME partiellement;

CONDAMNE la CAMARA AGRARIA PROVINCIAL DE GUIPUZCOA à payer à Monsieur MARGARON 101.825,50 F [...], en principal, outre intérêts moratoires de droit à compter du lendemain du jour où les factures devaient être payées;

JUGE que les intérêts seront capitalisés à compter du 2 mai 1994, lorsqu'une année entière aura couru;

La CONDAMNE à payer à Monsieur MARGARON 10.000 F [...], au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

La CONDAMNE aux dépens.

PRONONCE publiquement par Monsieur BERAUDO, Président, qui a signé avec Madame COMBE, Greffier.}}

Source

Original in French:
- Unpublished

Lower instance:
- Tribunal de Grande Instance de Grenoble, dated 11-03-1993 (Unpublished)

Source:
- M. le Juge Jean-Paul Beraudo, Cour d'Appel de Grenoble, France}}