Data

Date:
13-11-1992
Country:
Belgium
Number:
R.G. 4.825/91
Court:
Tribunal de Commerce de Bruxelles, 11ème ch.
Parties:
Maglificio Dalmine s.l.r. v. S.C. Covires

Keywords

APPLICATION OF CISG - FORUM SITUATED IN A NON-CONTRACTING STATE - CHOICE OF LAW OF CONTRACTING STATE AS GOVERNING LAW OF THE CONTRACT (ART. 1(1)(B) CISG)

Abstract

A Belgian buyer ordered clothes from an Italian producer. The goods were delivered, but the buyer did not pay the price. In consequence, the seller refused to deliver other clothes in execution of a subsequent order made by the buyer and commenced action claiming payment of the price plus interest, as well as damages for not having been able to deliver the clothes in execution of the second order because of the previous non performance of the buyer. The buyer counterclaimed damages alleging breach of the second contract for non-delivery of the goods.

Although Belgium had not yet ratified CISG, the Court held that CISG was applicable since the parties had expressly chosen the law of Italy, a contracting State (Art. 1(1)(b) CISG).

Without further referring to CISG, the Court held that the buyer should have paid the price on the date fixed by the (first) contract. In addition, the Court granted the seller the right to interest at the Italian statutory rate, accruing from the date when payment was due. The seller was also granted an additional sum to assure the revaluation of its credit corresponding to the increase of the cost of living in the seller's country.

The Court disregarded the buyer's counterclaim inasmuch as it was the seller's right to suspend delivery of the goods until the buyer had fulfilled it's obligation to pay for the goods already delivered. The Court also rejected the seller's claim for damages, as the seller had failed to give evidence of either having produced the goods or of having resold them at a lower price.

Fulltext

[...]

I. - Objet des actions.

L'action Principale tend à la condamnation de la défenderesse au paiement :
- de 38.442,- fr étant une facture du 2 avril 1990 couvrant le prix de vente de marchandises payables le 2 juin 1990;
- des intérêts de retard depuis cette date au taux de 10% l'an;
- de 10.000,- fr à titre de compensation de l'érosion monétaire;
- de la contrevaleur au francs belges de 2.399.600,- Lit, à titre de dommages et intérêts en raison de la production de marchandises, qui n'ont pu été livrées à cause de la carence persistante de paiement de Covires.

La défenderesse conclut à la suspension de la procédure tant que la demanderesse n'aura pas fourni les informations suivantes:
1. l'identité de ses organes
2. l'identité des personnes qui ont décidé de lancer la citation et la copie certifiée conforme de cette décision
3. une copie certifiée conforme de ses statuts
4. la 'lex societatis'. La défenderesse a précisé à l'audience qu'elle entendait par là la loi italienne.
En ordre subsidiaire, la défenderesse estime qu'il y a lieu d'interroger la Cour de Justice à Luxembourg sur le point de savoir si la Convention de Rome du 19 juin 1980 a prééminence sur la Convention de Vienne du 11 avril 1980 lorsque ces deux conventions entrent en conflit.
En ordre plus subsidiaire, la défenderesse conclut au fondement partiel de la demande à concurrence de 38.448,- fr et à une réduction des dépens.
Elle demande reconventionnellement la condamnation de la demanderesse au paiement de 100.000,- fr à titre de dommages et intérêts en raison de l'inexécution d'une commande aux torts de la demanderesse.

La demanderesse fabrique des articles vestimentaires tandis que la défenderesse exploite un commerce de vente au détail de ce type d'articles.

Le litige qui oppose les parties concerne d'une part une commande qui fut exécutée, facturée le 2 avril 1990 et qui devait être payée le 2 juin 1990. Cette facture n'est pas contestée.

Il concerne d'autre part une commande du 8 février 1990 qui ne fut que partiellement exécutée.

[...]

III. - Conflit entre la Convention de Vienne (1980) et la Convention de Rome (1980)?

Les parties se référant à la Convention de La Haye du 15 juin 1955, s'accordent pour considérer à bon droit que la loi applicable à leurs relations contractuelles litigieuses est la loi italienne sur base de la clause contractuelle désignant expressément cette loi. L'Italie ayant approuvé la Convention de Vienne du 11 avril 1980 relative aux ventes internationales de marchandises, c'est cette convention entrée en vigueur en Italie le 1er janvier 1988 et qui fait partie de l'ordre juridique interne italien qu'il convient d'appliquer.

Si les parties s'accordent encore sur ce point, Covires se pose la question de savoir si la Convention de Rome ratifiée par la Belgique n'aurait pas une prééminence sur la Convention de Vienne non ratifiée par ce même pays.

L'article 21 de la Convention de Rome prévoit qu'elle ne porte pas atteinte à l'application des Conventions Internationales auxquelles un Etat contractant est ou sera partie. C'est l'application du principe de primauté de la règle particulière sur la règle générale.

L'Italie est liée par la Convention de La Haye de 1955, par celle de Vienne et par celle de Rome.

En vertu de la règle énoncée, la Convention de La Haye et celle de Vienne l'emportent sur la Convention de Rome. (voir N. Watté, 'La vente internationale de marchandises: bilan et perspectives', RDC, 1991, p. 366 et 5, spéc. n° 12 (note 24). Il n'y a par conséquent pas lieu d'interroger la Cour de Justice.

IV. - Action principale au fond - facture de 38.442 fr.

La facture de 38.442 fr, dont il est demandé paiement, n'est pas contestée. Elle est due. La demanderesse a droit à des intérêts moratoires depuis l'échéance de la dette soit le 2 juin 1990 sur base de l'article 1224 du Code Civil Italien.

Ces intérêts sont dus aux taux légaux de 5% du 2 juin 1990 au 15 décembre 1990 (1.190 fr) et de 10% du 16 décembre 1990 jusqu'à parfait paiement. (modification du taux intervenu dans l'article 1284 du C.C. Italien, entré en vigueur le 16.12.1990).

Elle a également droit à titre d'indemnisation du dommage subi par le non paiement à l'échéance convenue à une somme de 10.000 fr assurant une réévaluation de la créance par rapport à l'augmentation du coût de la vie dans son pays, conformément à la jurisprudence italienne.

Contrairement à ce que prétend Covires, les intérêts dus sur une somme pour réparer le dommage subi par le créancier en raison du retard fautif de règlement d'une dette contractuelle découlent du droit des obligations et du droit des contrats et non pas de la procédure judiciaire.

Si la loi du for régit les règles de procédure qui sont celles relatives au déroulement du procès, elle trouve là sa limite et ne peut être étendue au régime des intérêts moratoires qui est indifférent au fonctionnement de l'appareil judiciaire. (F. Rigaux, Droit international privé, t. II, p. 208).

Les discussions relatives aux intérêts de retard participent au débat quant au fond et sont soumises comme telles à la loi italienne.

Covires fait état d'une action engagée par la demanderesse contre le sieur Bonaventure tendant au paiement de la même somme que celle facturée et crie au scandale au qualifiant le comportement de la demanderesse de manouvres 'mafieuses'. La demanderesse établit que les deux actions ont deux causes différentes, l'une portant sur l'exécution du contrat par son cocontractant et l'autre tendant à obtenir le respect d'un engagement de garantie souscrit par une tiers. La demanderesse est parfaitement en droit d'agir comme elle l'a fait. Le ton et le vocabulaire utilisés par Covires sont particulièrement mal venus sous la plume d'une partie qui multiplie les argumentations dilatoires pour ne pas payer une dette échue depuis plus de deux ans et qui n'a jamais fait l'objet de la moindre contestation.

V. - Commande inexécutée - demande principale et reconventionnelle.

- Covires a commandé des marchandises à la demanderesse au principal en février 1990 par l'intermédiaire du représentant de celle-ci M. Bonaventure. Cette commande était destinée à la saison d'hiver 19901991.

Elle n'a reçu qu'une livraison très partielle et réclame en conclusions un manque à gagner sur la marchandise non livrée qu'elle évalue ex aequo et bono à 100.000,- fr. Le note déposée à l'audience indique que la marchandise non livrée totalisait 69.220 fr. (note de Covires).

La demanderesse a décidé légitimement de suspendre ses fournitures à la défenderesse tant que celle-ci ne respecterait pas ses obligations. Eu égard à la créance certaine, liquide et exigible de la demanderesse en juin 1990, elle était en droit de ne pas fournir les marchandises litigieuses comme elle le fit en vertu de l'exception d'inexécution.

La demanderesse relève avec justesse que Covires l'avait très bien compris puisqu'elle n'a jamais réagi au défaut de livraison. Celle-ci confirma à l'audience ne jamais avoir adressé de mise en demeure à la demanderesse. La réclamation formulée pour la première fois dans des conclusions déposées en octobre 1991 est non fondée.

- La demanderesse réclame paiement de quelque 2.400.000 fr afin d'être indemnisée du préjudice qu'elle aurait subi du fait d'avoir produit les marchandises commandées par Covires sur la promesse de celle-ci d'acquitter sa dette, sans toutefois avoir pu les lui livrer parce que la promesse de payer n'a pas été tenue.

Il ressort des pièces 6 et 7 déposées par la demanderesse que celleci n'a accepté la commande querellée en juin 1990, que si son représentant, M. Bonaventure, payait d'anciennes factures fin août 1990, ce qui selon son exposé ne fut pas réalisé. Elle n'établit pas avoir fabriqué les marchandises non livrées ni les avoir réalisées partiellement à un prix réduit. Elle ne dépose aucun élément à son dossier à cet égard et ne justifie pas dans ces conditions du dommage allégué. Sa demande ne peut être accueillie.

[...]

PAR CES MOTIFS, Le Tribunal,

Déclare l'action principale recevable et fondé comme suit:

Condamne la S.C. COVIRES à payer à la demanderesse les sommes de dix mille francs, trente-huit mille quatre cent quarante-deux francs et mille cent nonante francs ainsi que les intérêts moratoires sur 38.442,- fr au taux de 10% depuis le 16 décembre 1990 jusqu'à la citation puis les intérêts judiciaires au taux de 10% jusqu'à parfait paiement.
Déclare l'action reconventionnelle recevable mais non fondée.

Liquide les dépens à l'égard de la demanderesse à onze mille cent francs + cinq mille huit cent nonante-sept francs et à 1'égard de la défenderesse à onze mille cent francs.
Condamne la S.C. Covires aux dépens.

Autorise 1'exécution provisoire du jugement nonobstant tout recours et sans caution.}}

Source

Original in French:
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